Voici une trouvaille audacieuse pour comédiens sans filets !
Sans filets, vraiment ? Eh oui, tout le sel de ce spectacle réside dans l’ignorance des comédiens à connaitre le texte et le sujet de la pièce; tout reste à inventer !

Cela étant, des filets, il n’en manque pas, à en juger par le décor arachnéen qui se présente à nous. Voyez-vous même: des filets, des filets et de fil en aiguilles, ça se précise avec des balles de tennis, tantôt fluorescentes, tantôt exposées sans fioriture qui jonchent le plateau comme autant de pommes après la secousse de l’arbre fruitier.

La scénographie, pensée par Maxime Dufresne, est donc centrée sur le tennis mais puisque le théâtre est une passion d’équipe, Maxime nous demande, à nous le public, de choisir la thématique de ce soir. Le vote se mesure à l intensité des applaudissements et c’est la maternité dans le sport qui a happé la curiosité du plus grand nombre.

Le cadre ainsi posé; les comédiens ne tardent pas à faire leur entrée.
Le premier tableau s’ouvre avec le premier duo, Katia et Mathias, interprété avec brio par Nina Cachelin et Paul Berrocal.

Le couple traverse une mauvaise passe: il faut dire qu’à quelques mois du fameux tournoi mixte, la nervosité gagne du terrain. Car à l’instar de son père et son grand-père, Mathias veut à tout prix remporter le tournoi.

C’est là que Katia lui avoue qu’elle n’aime pas spécialement le tennis.
Sur ce constat en forme de coup de poing pour Mathias, ce dernier décide de prendre des mesures.

Débarque alors un coach totalement loufoque, Malik Kaufmann, de renommée régionale, excusez du peu ! plus porté sur la guitare que sur la raquette. Après quoi, le puzzle se construit peu à peu avec l’entrée d’un second couple, obsédé par la performance et follement drôle dans le genre cyborg du perfectionnisme, joué par Eric Lecoultre et Pauline Maitre, une mère arbitre autoritaire non moins surprenante dans sa façon de compter les points Laure Piguet et enfin l’enfant à naître de Katia, Léon Boesch , dont les interventions sous une douche de lueur délicate, distille un souffle de poésie qui sublime cette comédie savamment rythmée.

S’il n’y a pas de pas de texte, en revanche, il y a du rythme et de fait, une spontanéité incroyable. Les scènes se succèdent, les tableaux s’imbriquent dans une fluidité limpide qui ne s’encombre d’aucun faux pas.

Et ce, grâce au talent des comédiens dont l’écoute, la répartie et la vivacité d’esprit s’avèrent essentielles pour cet exercice périlleux. A ceci s’ajoute l’évidente complicité des comédiens. Après l’entracte interminable des derniers mois, le plaisir qu’ils ont à jouer ensemble est là, palpable, et passe même par l’esquive d’un fou rire à peine dissimulé néanmoins maîtrisé.

Qui dit comédie, dit rythme mais également percées d’émotions.Ingrédient acidulé indispensable pour donner du relief à l’intrigue sans lequel, elle ne ferait que glisser dans la facilité dans un grand flop.

Ces moments d’émotion sont souvent provoqués par l’enfant, apparition lumineuse dans une chrysalide de filets emmêlé, qui se questionne, interpelle, s’insurge, vit. Avec lui se pose la question du doute. Katia s’interroge, se demande quoi faire, comment réagir et que penser ; ça tombe mal, ça tombe toujours mal parce qu’on se sent rarement prête. Entre temps, Mathias, sous pression, ne sait plus où il en est, réclame un moment de recul tandis que l’autre couple gagne en force et se rapproche de la victoire.

En dépit de tous ces nuages, tout est bien qui finit bien. La dernière scène s’achève sur une belle image toute en fluorescence et en chanson avec ukulélé où tous les comédiens sont rassemblés.

Voilà qui ressemble, à s’y méprendre, à une invitation à les rejoindre pour célébrer le retour du jeu, de la connivence, de l’inventivité. Dès lors, plus qu’une chose à dire: que le spectacle continue !

Scénographie : Maxime Dufresne

Jeu : Paul Berrocal, Léon Boesch, Nina Cachelin, Malik Kaufmann, Eric Lecoultre, Pauline Maitre, Laure Piguet

La Générale improvisée


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