Dans la bande-dessinée « Destins Coréens » qui est le dernier épisode du célèbre triptyque « Nos Adoptions », nous rencontrons, cette fois-ci: Joy, une jeune coréenne tombée enceinte suite à une brève relation avec un étudiant de l’Académie de K-pop, qui l’a lâchement abandonnée. Méprisée, insultée et critiquée par son entourage, dans un pays où les naissances hors mariage sont considérées comme honteuses, celle-ci décide de se rendre au bureau des adoptions de Séoul pour se débarrasser définitivement du bébé encombrant.
Ayant perdu toute dignité et ne recevant aucune aide parentale durant ses démarches (son père étant souffrant et sa mère ayant un caractère difficile), Joy pense également au suicide. Heureusement pour elle, la situation va rapidement évoluer, car après avoir lu le récit d’un adopté coréen et avoir rencontré l’auteur, la jeune femme, convaincue, décide d’annuler la procédure d’adoption et de reprendre sa vie en main. Quant à Jung, le scénariste de cette BD, il va replonger dans les funestes souvenirs de sa sœur décédée, Valérie, qui incarne le destin tragique des coréens adoptés les plus malheureux…
Ce récit touchant et poignant mêle habilement deux voix, celle d’une jeune mère célibataire dépressive et celle d’un adopté coréen ayant refait sa vie en France comme auteur. Après avoir fait la connaissance d’Olivier, Mélanie, Cécile et Cyril, des coréens adoptés qui ont décidé de rechercher leurs parents biologiques dans les premiers volumes de la série, nous nous intéressons cette fois-ci au récit d’une mère qui a tenté de vendre son enfant pour ne pas dépérir, dans un pays où les mœurs n’ont pas évolué.
Ces aventures humaines que l’auteur partage avec le lecteur, à travers les témoignages des parents adoptifs et naturels sont captivantes mais assez déprimantes. Jung dévoile avec pudeur et finesse, la façon dont chacun d’eux a vécu sa quête. Le dessin d’une grande délicatesse et teinté de mélancolie sert cet ultime album de 136 pages vibrant de sincérité.
Depuis 1953, plus de 200’000 enfants coréens ont été adoptés dans le monde, c’est sûrement autant de parents biologiques ayant souffert de la culpabilité d’abandon. Certains d’entre eux, comme ceux d’Olivier et Cyril, ont retrouvé leur enfant après des décennies, mais d’autres n’auront jamais cette chance, comme la mère de Mélanie et Cécile. Quant à Joy et son fils Sunku, ils réussiront finalement à vivre leur malheur de manière acceptable en regardant vers l’avenir.
Après la Couleur de peau : Miel et Babybox, adapté au cinéma il y a dix ans, Jung accompagné par Laëtitia Marty, continue son exploration autour de l’adoption, en se tournant du côté de la Corée du Sud, en critiquant le système, mais en y apportant également des solutions.
Laëtitia Marty est née en 1977 à Séoul en Corée du Sud. L’autrice qui réside actuellement dans les Alpes-Maritimes s’est principalement occupée des illustrations alors que son collègue Jung, également né à Séoul aborde le thème de l’adoption à travers le regard qu’il porte sur son parcours personnel. Lors de rencontres en dédicaces ou suite à des interventions liées à la projection du film, il a rencontré d’autres adoptés qui lui ont raconté leur parcours de vie. Issus de ce ces partages, ce nouveau triptyque met en lumière les histoires différentes de ces personnes ayant vécu des moments intenses. Chaque tome donne ainsi la parole à une catégorie de personnes impliquée dans le processus d’adoption.
Parue le mars 2025 en librairie, « Destins Coréens » complète un projet ambitieux qui comporte des touches personnelles et poétiques des auteurs. Destiné à un public adulte intéressé par le thème de l’adoption, cette nouvelle BD est vivement recommandée.



Récit complet par : Jung & Laetitia Marty
Éditions Delcourt / Encrages
www.editions-delcourt.fr
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