On peut commencer par bien regarder la jaquette de couverture qui se joue en recto-verso : ce que l’on voit au dos (verso) est l’autre bout de la photo au recto (Claudine Gabay vue de face) et à la fois dans et hors du rectangle où s’inscrivent les principaux noms. Ce regard attentif me permet je crois de dire que le cinéma de Marguerite Duras est « formel ». Et j’ajoute : littéraire. Mais vous savez comme moi que l’on ne doit pas distinguer le fond de la forme ou mieux que la qualité d’un auteur se mesure à l’adéquation entre fond et forme. Et puisqu’ici il est question de cinéma on posera la question du choix et de la direction des comédiens.
Commençons par ce que l’on voit. Les images sont dans ce film volontairement et parfaitement maîtrisées – rien n’est laissé au hasard – elles découpent l’espace où évoluent les personnages et nous renseignent sur les rapports entre eux – on portera une attention certaine aux relations intérieur/extérieur – ou avec eux-mêmes. Je voudrais vous signaler un bref passage où Claudine Gabay et Delphine Seyrig cherchent et suivent des yeux une musique que nous et elles entendons. Il n’y a que deux hommes dans ce film et leur rôle est bref. C’est une histoire de femme. Celle de Baxter Vera, celle de Vera (Baxter). Elle rencontre une ancienne maîtresse de son mari (Jean, dont l’absence est lourde) : Noelle Chatelet – qui est aussi une auteure fort intéressante – et Delphine Seyrig dont la fonction n’est pas précisée mais dont le « rôle » est important. Une jeune femme qu’on peut supposer être l’actuelle maîtresse apparaît deux fois à l’écran dans un autre décor. Il me semble que la direction d’acteur est ici exceptionnelle. Pourquoi ? Parce que dire une série de phrase courte, beaucoup de « Oui » de « Non » en changeant de ton pour donner beaucoup de sens à ces monosyllabes est un exercice délicat. Baxter V. est un produit de notre société, une femme mariée à un homme banal et masculin – elle pourrait être la mère de « Potiche » la femme présentée par J.-F Ozon et interprétée par Catherine Deneuve – qui porte de manière ostentatoire les bijoux qui font d’elle une riche bourgeoise installée… mais qui n’est pas ELLE.
Vous avez compris que ce film ne se laisse pas seulement voir, il exige qu’on le regarde…
DVD Baxter, Vera Baxter
Auteur : Marguerite Duras
Editeur : INA
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