En couverture une superbe photo du pont de Brooklyn. Il s’agit d’un premier roman et j’espère que son auteure trouvera le temps d’en écrire d’autre. Pourquoi ? Tout simplement parce que c’est remarquablement écrit, voyons.
Je pense qu’il y a deux types d’écriture. Celle qui raconte des faits et les organise pour vous tenir en haleine et vous distraire, ça vous connaissez. Ce qu’on appellera de la littérature ordinaire. Celle qui procède par image – rapprochement entre deux « choses » qui d’ordinaire ne se fait pas – et vous présente des faits à sa manière – des faits imagés. Ce que parfois vous trouvez trop poétique. Gabrielle Segal nous propose de « voir » dans un petit immeuble de Brooklyn – rappelez-vous la courte séquence de Playtime de Jacques Tati dans laquelle les fenêtres s’allument comme autant de postes de télévision.
Mary-June Parker et ses deux fils d’abord, battue par Pete son mari et la disparition de ce dernier. Puis Norman Klein qui rappellera à certains un meurtrier hitchcockien et la propriétaire de l’immeuble Madleen Hutikon, et enfin Stéphan Karmeer l’épicier de la rue qui a connu Madleen jadis à Berlin sous Hitler. L’auteure leur donne des voix pour raconter et expliquer. Et bien sûr elle n’oublie pas Pete…
C’est dense et prenant et peut-être y trouverez-vous, comme moi – j’espère que l’auteure ne m’en voudra pas de ce rapprochement – un petit côté Eugène Ionesco. Celui qui rend ses personnages attachants parce que semblant abandonnés dans une situation qui les dépasse et qui font face à leur manière.
Je crois que ce livre doit se lire avec la lenteur nécessaire à la prise de conscience de ce qui a été lu. Il doit être assimilé.
Bonne lecture.
Brooklyn Strasse
Auteure : Gabrielle Segal
Editeur : Maurice Nadeau
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