On retiendra de la couverture trois choses en dehors du titre : deux citations de presse imprimées en bleu très pâle et la mention : Prix Nobel de littérature 2015. Vous vous en souveniez ? J’ai cherché à savoir pourquoi cette Nobel m’avait échappé… Pas difficile : en 2014 c’était Modiano et en 2016 Bob Dylan. Là je suppose que vous vous souvenez du double bruit… Enfin je me pose la question : est-ce qu’un Prix Nobel biélorusse se vend bien ? Pour ce qui est de ce livre, peu importe que l’auteure soit Nobel ou pas, ce qui importe c’est son intérêt, sa nécessité… Mais restons encore un peu hors du livre pour signaler que l’auteure a mis sept ans à recueillir les témoignages qui le composent. Nous, Européens, avec des héroïnes pour faire pendant à nos nombreux héros… tous ou presque ayant eu droit à leur moment de gloire… Pour les femmes c’est moins évident et j’aimerais que l’on me dise ce que Jeanne la bonne Lorraine pouvait bien avoir de féminin. Aujourd’hui chez les Peshmerga est-ce que l’on distingue les hommes des femmes ? Svetlana Alexievitch s’est heurtée au même problème. D’une part, aux yeux des hommes combattants, faire entendre la voix des femmes risquait de dévaloriser les combats, par trop de sensiblerie et, d’autre part, aux yeux de certaines femmes refusant de témoigner : ‘Je ne peux pas. Je ne veux pas me souvenir. Trois ans passés à la guerre… Et durant trois ans, je n’ai plus été une femme. Mon organisme était comme en sommeil.’
Vous avez compris, je pense, la nécessité d’une lecture lente et réfléchie. L’auteure, elle, a bien mesuré l’importance de ce qu’elle a recueilli : ‘Je suis bien consciente qu’on ne peut soumettre les cris et les pleurs à aucun travail d’écriture, car autrement l’essentiel n’est plus les cris et les pleurs mais l’écriture elle-même.’
Bonne lecture…
La guerre n’a pas un visage de femme
Auteure : Svetlana Alexievitch
Editeur : J’ai Lu
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