La route au tabac

La route au tabac

Une couverture qui devrait tirer l’œil de l’éventuel lecteur/acheteur d’autant plus que l’auteur mérite que l’on s’intéresse à lui et que ce roman est emblématique. Mais je voudrais faire un reproche à l’éditeur : celui de ne pas avoir reconsidéré la traduction qui date de 1947 et me semble peu adaptée à Caldwell. Je vous entends d’ici, vous êtes en train de vous dire : il ne sait ce qu’il veut, celui-là. Tantôt il râle contre les traductions trop modernes, tantôt il râle contre les trop vieilles. Je m’explique : Caldwell fait parler et agir de pauvres paysans du Sud des États-Unis, des petits blancs qui ont subi et subissent la crise de 1929. On ne me fera pas croire qu’ils parlaient comme on les traduit ici. À part quelques élisions du style « J’t’promets », la langue est bien châtiée. Exactement comme si le traducteur avait privilégié le beau langage à la française avec ses imparfaits du subjonctif plutôt que de respecter l’accent de l’authenticité que recherche Cladwell.

Si je vous présente des personnages, vous comprendrez ce que je veux dire. C’est Lov Bensey qui apparaît en premier, chargé d’un sac de navets qu’il a payé 50 cents. Il travaille à remplir des cuves de charbon pour les trains. Il veut rencontrer Jeeter Lester dont il a épousé la plus jeune des filles, Pearl, âgée de treize ans. Cette épouse n’en est pas une, elle dort à côté du lit conjugal et ne dit rien. Jeeter a deux autres enfants : Ellie May, affligée d’un bec de lièvre, et Dude qui va sur ses 14 ans. Ada, leur mère, est morte. Il reste la grand-mère et des noirs – quantité négligeable dans l’histoire. Mais vous l’aurez deviné, le personnage principal c’est Dieu. Un dieu qui brille par son absence mais que les gens se plaisent à invoquer à tout bout de champ pour se justifier ou s’excuser.

Un bon livre pour réunir un prof d’histoire, un prof d’anglais et un prof de français ou les mêmes au féminin…

Bonnes lectures.

La route au tabac
Auteur : Erskine Caldwell
Editeur : Belfond
Collection : Vintage

www.belfond.fr