Et si on jouait sa vie comme on jouerait sur scène ? Et si le jeu s’invitait partout ? Alexis Michalik crève ici le décor pour gommer les frontières entre scène et réel et nous précipite dans une pièce virevoltante, délicate, cocasse, déjantée qui nous fait tourner la tête.
Dans une prison, Richard, metteur en scène sur la pente descendante, dispense des cours de théâtre aux détenus. Mais seuls Ange, quinquagénaire taciturne et Kevin, répondent à l’appel toutefois en traînant des pieds. D’entrée de jeu, la situation comique fait son effet. C’est le moment où les interactions avec le public démarrent.
En dépit de leur peu d’intérêt pour le théâtre, les deux compères vont peu à peu se plier aux exercices. C’est alors que le théâtre vient les bousculer; et les voici à jouer leur vie. Entre descente dans le passé et bond dans le futur, l’histoire se dessine et le puzzle se met en place. On apprend leur histoire, les tournants, les blessures. Les histoires de chacun s’enchevêtrent, se répondent.
On change de scènes et de personnages en un battement de cils. D’un geste vif, les comédiens opèrent les changements de décor, déplacent certains éléments, s’asseyent se lèvent comme dans un jeu de chaises musicales, enfilent un vêtement et deviennent autres sous nos yeux sans passer par la case coulisses. La musique, elle aussi, varie (guitare électrique, clavier) et apporte la touche d’onirisme à l’ensemble tout comme les effets de lumière de Raphäel Charpentier.
Michalik signe une mise en abyme parfaitement réussie sur un rythme maîtrisé, réglé comme du papier à musique. Ce dernier n’empêche nullement les instants d’émotions, de délicatesse, de drôlerie; au contraire, ils sont mis en exergue. Après Le Cercle des illusionnistes et Edmond entre autres, Michalik est décidément le génie des pièces foisonnantes, truffées d’humanité.
Texte et mise en scène : Alexis Michalik
Jeu : Raphaël Bancou, Christopher Bayemi, Hocine Choutri, Johann Dionnet, Ariane Mourier, Marie Sambourg
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