L’édition grand format de ce recueil de textes date de 1986 et je ne suis pas sûr que Thomas Bernhard (1931-1989) soit bien connu des lecteurs et des amateurs de théâtre d’aujourd’hui. Vous avez là une bonne approche. D’abord en commençant par la ‘Chronologie’ qui se trouve en fin de volume et met en relation la vie et l’œuvre, même si elle s’arrête à 1986. L’achever et lui adjoindre une bibliographie aurait singulièrement amélioré le livre. Il me semble que l’on trouve au fil des pages un autoportrait du non-écrivain qu’il dit être. Il se préfère en homme qui écrit et en le lisant vous découvrez l’homme, l’homme qui écrit et ce qu’il dit de lui et de nous. Et je pense que s’il dit bien ‘Je’ il est très proche de nous… la différence vient je crois de ce qu’il écrit. On notera à ce propos qu’il a reçu un grand nombre de prix littéraires au point de faire un recueil de ses discours de réception de ses prix (Mes prix littéraires, Gallimard). Il y a trois discours de ce type ici, laissez un temps long entre leur lecture pour pouvoir en saisir les nuances. Si vous connaissez le dramaturge Bernhard, vous ne serez pas surpris de le lire dramatiser son ‘Paysage d’enfance’ ou ses ‘Trois jours’ mais peut-être serez-vous étonné de ce qu’il énonce sur son théâtre en justifiant le titre du recueil. Il dit tirer son théâtre du noir et force est de constater que nous, spectateurs, sommes d’abord dans le noir puis que la scène où l’on s’agite, se met en place est dans le noir et de ce dernier noir sort brutalement ou progressivement ce que l’on est venu voir, comme si nous découvrions un/le Monde. L’homme-auteur est passionnant et digne d’intérêt et je pense qu’en complément de cette lecture de Ténèbres vous pourriez poursuivre votre approche avec L’imitateur, Gallimard. Citation datée de 1965 : « Ce que nous possédons, c’est l’expérience, quelque chose de métaphysique dont, quand nous avons du temps pour la peur, nous avons peur, devant quoi, et c’est là le dévoiement même, nous capitulons : nous nous mourons, cavaliers seuls de notre impuissance que nous sommes, orphelins de l’histoire, articulations mortes de la nature… ».

Bonne lecture.

Ténèbres
Auteur : Thomas Bernhard
Editeur : Maurice Nadeau
Collection : Poche

www.maurice-nadeau.net

Ténèbres
4.0Note Finale

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