The Last Guardian est une des Arlésiennes les plus marquantes de la génération PS3. Le titre de Fumito Ueda, le créateur de Ico et Shadow of the Colossus est enfin entre nos mains sur PS4. Une aventure poétique et poignante remplie d’émotions. Un grand jeu en toute simplicité à ne pas rater.
The Last Guardian aura su se faire attendre. En développement depuis de 2007 par l’équipe Ico et annoncé en 2009 à l’E3 en tant qu’exclusivité PS3, The Last Guardian sort finalement en décembre 2016 sur PS4 finalement. Le développement chaotique du titre avait laissé présager du pire. Pourtant, c’est une aventure et une expérience magique qui attend les joueurs. Le jeu est loin d’être parfait. Il a d’énormes défauts techniques dont nous parlerons plus tard, mais il a un univers bien à lui, une ambiance et un sens de la narration que seul les titres de Fumito Ueda sont capables de faire vivre. C’est de la poésie pour le jeu-vidéo.
Le jeu est très mystérieux. Dès le début, on est dans le flou total. On incarne un petit garçon avec des marques noires sur tout le corps. On se reveille à côté d’une étrange et immense bête enchaînée. A partir de là, le jeu laisse le joueur se débrouiller. On comprend vite que la bête est blessée et qu’il faut s’en occuper. Il faut déjà apprivoiser l’animal pour nous laisser l’approcher. On apprend donc vite les mécaniques de déplacement et d’action du petit garçon. Comme dans Shadow of the Colossus, on saute avec le bouton triangle et on descend avec le bouton X. Le bouton d’action est le rond. On peut porter des objets ou actionner des leviers. Le bouton carré sert à lancer les objets. Tout cela est très simple et logique quelque part, mais on n’est pas vraiment sur les standards dont on a souvent l’habitude avec sauter avec X et se baisser avec O. Il faut donc s’adapter et accepter qu’il y ait sans doute quelques erreurs durant le jeu dû aux automatismes. Il faut donc nourrir la bête avec des tonneaux contenant une substance étrange. Une fois rassasié, la bête se laissé approcher, soigner et libérer de ses chaînes. Une complicité entre les 2 créatures se fait directement ressentir et un lien très fort se crée. C’est très puissant comme sensation, car on ressent tout de suite de l’affection pour Trico. Hé oui, la bête à un nom. Trico est un mixte entre un chat géant et un oiseau. Il fait la taille d’un tyrannosaure, il est couvert de plumes et à la morphologie d’un chat ou peut-être d’un chien, mais je dirais plus un chat. D’ailleurs, d’après certains sites internet Trico proviendrait d’une concaténation de mots japonais, Tori l’oiseau et Neko le chat.
Trico est, pour moi, ce qui fait tout le sel du jeu. Les développeurs ont réussi à rendre la bête vivante et attachante. Ses déplacements sont d’une véracité, c’est bluffant. Son regard est époustouflant. Ses grand yeux rond de chat sont remplis de naïvetés et de curiosités. C’est touchant. Quand Trico regarde quelque chose on croirait vraiment voir un chat, c’est malade. Trico bouge comme un félin avec des mouvements fluides, complets et naturels. Il tâte le terrain avec ses pattes en permanence. Il se gratte derrière les arrières. Il tord son corps pour se faufiler. C’est juste magique. On croirait avoir un animal de compagnie. D’ailleurs, on ne contrôle pas vraiment Trico. On l’aiguille, on lui montre des zones que l’on voudrait atteindre, on lui demande de sauter, mais après c’est lui qui décide si ça lui tente ou pas. Il ne fait pas non plus totalement comme bon lui semble, mais il n’agit pas au doigt et à l’œil. Il faut vraiment apprendre à le diriger et prendre son mal en patience lorsqu’il ne fait pas ce que l’on veut. Souvent, il ne regarde pas à la bonne place, il ne saute pas où on veut, il doit se placer pour se mettre en position et ça prend des plombes. Parfois, ça lui prend plus de 10 secondes pour exécuter un simple saut, car il calcule son élan, il se positionne et finalement il se lance, mais durant tout ce temps on se demande s’il va faire ce qui lui a demandé ou non. C’est toute cette partie, un peu frustrante parfois, de ne pas avoir un contrôle total de Trico qui rend The last Guardian assez différent des autres titres. Un lien vraiment très fort se crée entre le joueur et Trico. Plus qu’avec le petit garçon. Le jeu joue fortement sur l’affectif avec des scènes dans lesquelles on a vraiment peur pour le garçon ou pour Trico. On tient vraiment à ces deux personnages qui eux-mêmes tiennent l’un à l’autre et ça se ressent. L’entre-aide est quasi constante tout au long de l’aventure. D’ailleurs, l’histoire est longue. Il faut un bon 12 à 15 heures pour un premier run sans aide extérieure. Le scénario se dévoile petit à petit de manière très poétique. On comprend au fur et à mesure ce qu’il se passe, où on est, etc. Il y a pas mal de scènes wtf dans le jeu qui interpelle le joueur et qui ajoute du mystère à l’histoire et aussi de l’implication émotionnel. Ah et la fin est grandiose. La team ICO l’avait teasé et il avait raison. Le jeu est beau du début jusqu’à la fin.
L’aventure est globalement assez simple. Il faut essayer de se frayer un chemin et toujours avancer et s’enfuir de cet endroit mystérieux. C’est un jeu de plateforme à énigmes. Avec Trico, il faut à chaque fois résoudre un puzzle qui donnera accès à la suite et nous faire avancer dans l’aventure et dans l’histoire. Les puzzles sont souvent très simples dans leurs conceptions, mais pas toujours évidents à résoudre dans la pratique. D’une part dû à la complexité du puzzle, mais surtout souvent due à la complexité à faire que Trico ou le petit garçon fassent ce qu’on leur demande. La plupart du temps, il faut prendre son temps pour bien observer son environnement et trouver le chemin. Trouver le levier qui ouvrira la porte qui permettra à Trico de passer, etc. Il faut souvent grimper sur Trico pour profiter de sa taille et ainsi atteindre de nouveaux endroits. Il y a un bon mélange entre les phases où seul le garçon est nécessaire pour résoudre l’énigme, les phases avec « seulement » Trico et les phases en réelles coopérations. Il y a donc pas mal de réflexion pour résoudre les énigmes qui seraient plus de type recherche de chemin. L’observation est la clé du jeu. Ce n’est vraiment pas toujours évident de savoir comment sortir d’une pièce ou d’une grotte parfois. Il faut vraiment chercher dans les recoins les fentes pour se faufiler puis actionner un mécanisme puis remonter sur Trico et atteindre une nouvelle plateforme rendue accessible et ainsi de suite. Il y a beaucoup de verticalité dans les niveaux. Il faut donc souvent chercher dans les hauteurs la solution. Il m’est arrivé de chercher une solution pendant plusieurs dizaines de minutes en m’énervant. Souvent parce que Trico ne faisait pas ce que je lui demandais et généralement c’était parce que ce n’était pas ce qu’il fallait faire pour résoudre l’énigme. Par contre parfois, la solution était la bonne, mais l’exécution ne fonctionnait pas comme je l’entendais ou plutôt comme le jeu l’entendait. Il faut aussi bien penser à utiliser toute ses commandes pour se sortir d’une impasse, comme appeler Trico…Ce n’est pas toujours inutile et on n’y pense pas forcément. Bref, beaucoup de frustration et d’énervement dû à un gameplay un peu bancal et rigide, mais une bonne satisfaction de réussite après.
Le gameplay de The Last Guardian est daté. Mise à part Trico qui est, entre guillemets, nouveau, les mécaniques sont vieillottes. On grimpe sur Trico comme dans Shadow of the Colossus. Les phases de plateformes rappellent les Tomb Raider, mais pas les nouveaux…les anciens des années 90. C’est rigide, pas très précis, lent, il y a de l’inertie dans les personnages et j’en passe. De ce côté-là, ce n’est pas vraiment une réussite. D’un côté peut-être temps mieux, car sinon les énigmes auraient été beaucoup plus rapidement résolues. Là, ça ajoute un handicap important et souvent très frustrant. Entre ça et Trico qui n’en fait qu’à sa tête. Les autres mécaniques sont très simples. Porter des tonneaux, abaisser des leviers, ouvrir des portes et pousser des chariots. Grosso-modo c’est à peu près tout ce qu’il y a. Ah oui, et fuir des espèces de chevalier en armures qui veulent vous enlever. Ça peut paraitre faible, et ce l’est un peu, mais ça suffit. Le cœur du jeu est de résoudre les puzzles, interagir avec Trico et créer des liens. Il y a des phases de gameplay encore plus frustrantes que d’autres. Je prends pour exemple, la partie du jeu dans laquelle le petit garçon est emprisonné dans une cage et qu’il doit se déplacer avec comme un hamster dans sa boule sauf que la cage n’est pas sphérique. Les sauts depuis les chaînes sont aussi horribles. Entre les commandes mal faites et contre intuitive et la caméra qui est aux fraises, c’est la galère assurée, surtout si le timing est primordial. Par contre, la physique du jeu est bonne dans son ensemble.
The Last Guardian propose des graphismes en dents de scie. D’un côté, on a un jeu magnifique artistiquement et de l’autre, on a un jeu qui fait encore PS3 avec des soucis techniques très prononcés. Pour le positif, Trico est splendide. Sa bouille est attendrissante, ses plumes qui flottent avec le vent, qui brillent au soleil, ses grands yeux ronds et son animation des plus bluffante, c’est vraiment la réussite du jeu et on voit qu’une grande partie des efforts était là. Il n’y a pas d’interface ni vraiment d’aide à l’écran. Parfois le jeu affiche les commandes, mais sinon rien, sauf les sous-titres pour suivre l’histoire. Après, les environnements sont jolis dans leur ensemble. Il y a de gigantesques grottes, des « temples » lugubres fait de petits couloirs et d’escaliers avec une atmosphère pesante très réussie. Et il y a les montagnes et les structures extérieures qui apportent un peu de couleur et de verdure dans ce jeu un peu terne sinon. Les extérieurs sont gigantesques avec souvent de magnifiques éclairages. On ressent déjà un sentiment de grandeur entre le garçon et Trico, mais en extérieur c’est parfois Trico qui parait tout petit face à l’environnement. Il y a aussi des phases dans l’eau assez réussie. Encore une fois Trico nage comme un chien et s’essore en sortant de l’eau. L’eau est très bien rendue d’ailleurs. Souvent on s’arrête pour admirer les décors extérieurs. Par contre, que c’est faible techniquement. Première chose, le jeu rame souvent. Les frames tombent et on peine souvent à avoir un framerate à 30 images par seconde stable dès lors qu’il se passe un peu quelque chose à l’écran. Deuxième chose et sans doute la pire du jeu, la caméra. La caméra dans The Last Gaurdian est affreuse. On se croirait, à nouveau, dans des vieux jeux 3D d’il y a 15-20 ans. Ça part dans tous les sens, elle essaye de rectifier l’angle de vue empêchant de bien viser un point. C’est vraiment galère. Et le nombre de fois, que la caméra est dans les plumes de Trico lorsque le garçon est agrippé dessus dans des couloirs étroits. Souvent trop près du personnage, on a de la peine à évaluer les distances. Souvent on ne voit rien, la caméra est contre un mur, on ne sait pas où on saute sur les chaînes. C’est la cata, cette caméra. Les textures sont moyennes dans l’ensemble, comme dit plus haut, c’est un jeu PS3 qui est passé sur PS4 et ça se sent. Heureusement, que le côté artistique et la patte de la team ICO suffit à presque tout pardonner ces défauts techniques.
The Last Guardian est une expérience magique. Comme Ico et Shadow of the Colossus en leurs temps, ils n’avaient pas laissé les joueurs indifférents. La team ICO a le don, pour faire d’un jeu assez pauvre techniquement avec des graphismes dans l’ensemble assez moyen qui ne font pas vraiment génération actuelle, un gameplay très classique, simple et souvent bancal une œuvre d’art vidéoludique. On peste sur le jeu qui rame, les phases de plateformes approximatives, Trico qui ne réagit pas comme il faut, la caméra qui est à l’ouest et pourtant il y a quelque chose qui fait que ce jeu est somptueux. L’alchimie entre Trico et le petit garçon est tellement forte et pure qu’il y est difficile d’arrêter le jeu en pleine session. On a envie de faire le jeu d’une traite et pourtant l’aventure est longue. Trico est incroyable, il a été conçu avec tellement de soin qu’on en viendrait presque à oublier qu’il n’est pas réel. Il n’est pas parfait, loin de là. Souvent, il n’en fait qu’à sa tête et c’est énervant, mais c’est ce qui fait son charme. Sa façon de bouger et de réagir est époustouflante. C’est un gros chat tout mignon…avec des ailes et des plumes. Le scénario est globalement assez simple, mais tellement prenant et bien écrit. Tout en douceur et en finesse. On laisse le joueur découvrir par lui-même les mystères sans vraiment lui balancer à la tête les évidences. La musique aussi est extraordinaire. Elle marie parfaitement le scénario et les phases de gameplay. Les énigmes sont souvent assez simples sur le papier, mais demandent parfois pas mal de réflexion ou plutôt d’observation. Il faut ensuite ajouter à cela la variable « exécution » qui n’est pas toujours simple à mettre en place avec un Trico pas toujours très coopératif et des commandes par très instinctives, comme dans Shadow of the Colossus finalement. La solution est souvent sous les yeux, mais pas de la manière que l’on pense. Malgré tous ses défauts, comme pour Ico et Shadow of the Colossus, on ne ressort pas de The Last Guardian sans être touché ou ému au minimum. C’est très rare de vivre ce genre d’aventure, simple et tellement riche à la fois. Il se sera fait attendre longtemps, mais la team ICO a frappé fort encore une fois. The Last Guardian est un jeu à ne pas rater.
Les plus :
- L’émotion du jeu
- Un jeu-vidéo poétique
- Artistiquement somptueux
- Trico plus vrai que nature
- La relation avec Trico
- Long et captivant
- Une histoire belle et émouvante du début à la fin
- Pleins de mystères et de surprises
Les moins :
- La caméra à la ramasse
- Techniquement une génération en retard
- Ça Rame
- Des mécaniques de gameplay archaïques
- Souvent frustrant
Éditeur : Sony Interactive Entertainment
Développeur: Japan Studio (team ICO)
Sortie : 7.12.2016
Disponible sur PS4 exclusivement
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