Il me semble que l’illustration de couverture est bien faible au regard du contenu de ce court livre. Il est vrai, aussi, qu’il est difficile d’illustrer la densité et que chacun en a une version personnelle. C’est un premier ouvrage et je vous demande de commencer sa lecture par la fin, par les remerciements pour en noter la chaleur, la forme et le nombre de concernés et ensuite, quand vous aurez pénétré le monde de L, de noter le moment où cette lettre devient pour vous un pronom personnel. De marquer un temps avant de reprendre la lecture.
Mon âge et mon sexe ne me rendent pas très légitime pour parler de ce que j’ai perçu comme un post-partum particulier… Mais j’ai une excuse, le premier auteur auquel j’ai pensé est Boris Vian et à son dernier roman : L’arrache-cœur. Le titre et les passages qui y renvoient m’ont évoqué l’expressionnisme allemand ; il s’agit bien sûr du champ des caméras urbaines. Et l’éparpillement intellectuel, sensoriel de L, ses dédoublements-dédoublés que traduisent des moments d’une écriture qui peut sembler automatique m’ont renvoyé du côté de chez Robert Desnos… Je ne sais si l’autrice acceptera – se reconnaîtra dans – ces parentés, mais je les crois discrètes en filigrane. Je vous entends maugréer contre mes références masculines, rassurez-vous, l’autrice n’oublie pas l’homme, il est aussi anonyme qu’L, et elle parvient même, à mon sens, à le rendre ‘commun’…
Vous voulez je suppose une citation qui vienne confirmer votre envie de lire… J’en ai une qui me paraît faire l’affaire, elle est un peu longue : « L’enfant s’éveille, chouine. L attend un peu avant de se pencher pour l’attraper, elle ferme les yeux et regarde les sons émis par l’enfant se contorsionner sous ses paupières, sur le sol. Les sons de l’enfant sont de petits serpents très fins sur le parquet, se retournant sur eux-mêmes, sautillant autour du couffin. ».
Bonne lecture, lente.
Une femme entre dans le champ
Auteure : Emmanuelle Tornero
Editeur : Zoé
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